L’Ukraine et Macron

Le belliciste en chef Emmanuel Macron a donc finalement pris la parole mercredi dernier (le 14) pour réaffirmer sa position sur la situation en Ukraine. En république française, centre mondial de la diplomatie comme chacun sait, « l’ambiguïté stratégique » consiste à clarifier à l’ennemi que l’on se trouve bien dans une logique d’escalade.

En effet, comment devrions-nous appeler cela autrement ? Il y a deux ans, il s’agissait d’envoyer des gilets pare-balles ; on voit bien où nous en sommes aujourd’hui. En 2024, la différence entre une « démocratie » et une « autocratie » réside dans le fait qu’il faut plus de temps pour convaincre le peuple d’aller contre ses intérêts.

La situation géopolitique en Ukraine

La guerre en Ukraine est complexe et nuancée. Contrairement au film Marvel que nous propose notre chère république, il ne s’agit pas d’une attaque gratuite ou d’un impérialisme russe. Poutine n’est pas l’antagoniste d’un film où les gentilles démocraties gagnent à la fin. La Russie fait face à l’hostilité des États-Unis et de leurs états satellites, qui craignent un bloc économique eurorusse, voire eurasiatique avec la Chine. Un tel bloc serait centré sur une vision continentale du commerce et mettrait sérieusement à mal les intérêts des États-Unis.

D’un point de vue géopolitique pur, l’invasion était compréhensible. Poutine s’est senti acculé face aux ingérences américaines constantes, notamment avec Maïdan. L’extension potentielle de l’OTAN à l’Ukraine a été la goutte de trop pour Poutine qui craint que son pays soit circonscrit par une structure militaire hostile.

Une guerre fratricide

Pour autant que le choix d’une invasion soit rationnel, la guerre en Ukraine reste une guerre fratricide entre deux peuples très proches. En cela, elle est une catastrophe même du point de vue russe, et une catastrophe humanitaire tout court. Il aurait fallu garantir la neutralité ukrainienne il y a dix ans. Désormais, toute négociation semble compliquée et personne ne semble vouloir l’envisager. Sans implication directe et massive des pays occidentaux, il est probable que l’Ukraine perde la guerre. Elle cessera d’exister, alors qu’elle aurait pu jouer des rivalités en conservant sa neutralité entre les deux blocs est-ouest.

Cela est d’autant plus tragique que l’Ukraine était prête à signer un accord de paix peu de temps après le début de l’invasion. Ce sont les Occidentaux, et notamment les Britanniques, qui ont insisté pour que l’Ukraine se batte. Nous avons fait des promesses délirantes aux Ukrainiens sans aucune intention de les tenir. Depuis le début, nos dirigeants ont instrumentalisé des vies ukrainiennes pour affaiblir la Russie.

Ce qui nous amène aux hallucinations militaires de Macron.

Le pari stupide de Macron

Parmi les rares choses sensées que Macron ait pu dire, il ressort que l’Europe perdra toute crédibilité si la Russie gagne la guerre en Ukraine. C’est bien le cas. La question est : quelle Europe sera décrédibilisée ? L’Europe actuelle, technocratique et vassale des États-Unis ? Ou l’Europe des peuples, organique et historique ? Je pense que vous devinez la réponse.

Macron fait donc le pari du tout pour le tout. Jouer avec la vie des gens pour sa petite fierté ne le dérange pas outre mesure. J’imagine que si nous en arrivons là, nous ne verrons ni Macron ni BHL sur la ligne de front en costard pare-balles.

Citation d'un article de Paris Match sur la guerre en Ukraine. Bernard Henri-Lévy figure sur l'image d'en tête avec un gilet pare-balles par-dessus un costume.
Citation Paris Match. https://www.parismatch.com/actu/international/bernard-henri-levy-partout-ou-les-ukrainiens-ont-attaque-la-ligne-russe-cede-216136

De plus, il est peu probable que cela soit suffisant pour gagner… Et le régime ne se remettrait pas d’une défaite après l’envoi de troupes direct. Nos élites se mettent elles-mêmes dans une configuration dont la seule issue est soit leur chute, soit une troisième guerre mondiale. Que ce soit leur objectif ou le résultat de leur incompétence, nous arrivons à la même conclusion : nous sommes dirigés par des fous furieux.

Le point positif de tout cela, selon toute vraisemblance, c’est que cette erreur sera leur dernière. Cela vaut pour tous ceux qui s’engageront dans cette délirante aventure. Le régime en place est déjà très impopulaire et l’opposition grandit chaque jour à mesure que nos élites sont plus isolées. Une défaite militaire sera le seau d’eau qui fera déborder le vase.

Reste que des vies seront inutilement perdues par la faute de cette caste dégénérée. Nous aurions pu éviter tout cela il y a longtemps.

Poutine et la Russie

Poutine lui-même est un personnage complexe. Le fait qu’il a grandi, étudié et travaillé sous l’URSS tardive influence largement sa vision du monde. Il a vu son pays vendu à la découpe lors de la chute de l’union en 1990-91. De plus, Poutine dirige un pays à cheval entre l’Europe et l’Asie. Ne nous y trompons pas, les Russes ethniques sont des Blancs. Ils descendent des Rus’ de Kiev et sont des Blancs de l’Est. Ils ont subi pendant longtemps le joug des hordes nomades, d’abord avec les Mongols puis les Tatars. La brutalité de ces empires conditionne une certaine vision du monde, ancrée depuis plus de 600 ans chez les Russes. Donc, si les Russes sont des Blancs, leur culture est néanmoins différente des Occidentaux. Cela se remarque, entre autres, par la religion orthodoxe.

De base, Poutine est plus un européiste. Il a d’ailleurs été critiqué pour cela par des russes qui voient en l’Occident des partenaires indignes de confiance. On tend à l’oublier, mais Poutine était favorable à ce que la Russie entre dans l’OTAN. Il l’a répété dans sa récente interview avec Tucker Carlson.

Poutine n’est toutefois pas un nationaliste. Je peux comprendre qu’il veuille assurer la stabilité d’une fédération qui inclut des peuples non Blancs (Tchétchènes, Turkmènes…) Après tout, ce n’est pas du multiculturalisme à l’occidentale puisque chaque peuple conserve un territoire séparé, des traditions distinctes, etc. Néanmoins, la répression de tout mouvement nationaliste russe ethnique, même modéré, est fort dommage.

Malgré cela, Poutine reste un conservateur qui prône les valeurs familiales et tente, autant que faire se peut, de relancer la démographie des Russes ethniques. Cela nous apparaît déjà comme un rêve inatteignable, à nous occidentaux dégénérés.

Il s’agit donc de ne pas idéaliser Poutine, mais bien de réaliser que la situation est complexe. Comme nous l’avons déjà dit, tant l’Europe que la Russie auraient dû acquérir et garantir la neutralité ukrainienne il y a dix ans.

L’intérêt stratégique de l’Europe

Comme vous le savez sûrement, la vision que nous portons (le national-écologisme) prône une Europe unie. Par union nous n’entendons pas simplement une coopération, mais bien une union politique. Une confédération, par exemple, avec une forte décentralisation. Une telle configuration serait bien plus à même de conserver les cultures et identités nationales et locales de chaque peuple d’Europe. En effet, nous pourrions, grâce à notre force commune, éviter à nos cultures d’être diluées par l’importation de marchandises étrangères, américaines, chinoises ou autre. Nous pourrions enfin nous doter d’une diplomatie respectable et indépendante. Nous serions un bloc géopolitique alternatif, maître de notre destin. L’UE technocratique actuelle ne doit pas décrédibiliser le projet européen.

Une carte présentant une Europe unie
Treehill, CC BY-SA 4.0 https://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0, via Wikimedia Commons

Idéalement, notre intérêt se situe dans une neutralité qui nous permettrait d’échanger tant avec les États-Unis qu’avec la Russie. Au lieu de cela, notre alignement sur l’OTAN nous amène à devoir faire une croix sur des énergies peu onéreuses (gaz et pétrole russes notamment). Or, sans énergie bon marché, le processus de transition vers une société plus durable et plus organique sera d’autant plus complexe et difficile.

En tout cas, une chose est certaine : Macron et sa clique nagent en plein délire et nous emmènent tout droit à la catastrophe. Espérons que ce désastre sera le dernier de leurs méfaits.